Apprivoiser la couleur | Créer des nuanciers

Démarrons l’année en couleurs : la suite ! 

La semaine dernière, vous avez vu comment et pourquoi faire un cercle chromatique avec votre aquarelle ou votre gouache. Cette semaine, je vous propose de vous plonger dans les nuanciers pour continuer d’explorer les possibilités de votre medium.

Pourquoi se créer des nuanciers ?

Il y a plusieurs bonnes raisons de faire des nuanciers : 

• C’est un moyen de tester la réaction de vos couleurs en mélange : il y a le mélange de la nuance, mais vous verrez aussi que certains pigments se mélangent mieux que d’autres, ou donnent une résultante très éloignée de ce que vous imaginiez. 
• C’est l’occasion de vous créer un référentiel que vous pourrez consulter avant de choisir vos couleurs pour une peinture. 
• C’est amusant à faire 
• C’est super relaxant 
• C’est inspirant, car la couleur, ne l’oublions pas, c’est avant tout de la lumière, de l’énergie et de l’émotion. 
• Cela vous donne confiance en vous, car vous maîtrisez de mieux en mieux votre medium. 

Je vous recommande d’avoir un carnet dédié pour vos nuanciers plutôt que des feuilles volantes, question d’organisation. 

Pour mieux travailler, ayez aussi à portée de main : 

• votre nuancier de base (les couleurs pures) 
• votre cercle chromatique, pour vous repérer si nécessaire 
• Une palette à alvéoles si possible, pour préparer de bonnes quantités de couleurs

Nuancier à partir de 2 couleurs 

Démarrons par un nuancier à partir de 2 couleurs. 

Préparez 2 couleurs pures dans 2 alvéoles de votre palette. 

Pour le choix des couleurs, pensez à prendre des couleurs qui s’opposent sur le cercle chromatique, c’est plus intéressant : 

• BLEU / ORANGE 
• BLEU VIOLET OU VIOLET / JAUNE 
• ROUGE ou ROSE / VERT 

Avec votre nuancier de base repérez bien les nuances qu’il peut y avoir dans votre peinture pure. 

Dans ma palette, par exemple, le Rouge Sennelier tire sensiblement sur le rose plutôt que sur le orange. 

Construisez ensuite votre grille ainsi : 

	Peu dilué	Dilué	Très dilué
COULEUR 1
+ un peu de couleur 2
++ un peu de couleur 2
Mélange 50/50
+ un peu de couleur 1
+ un peu de couleur 1
COULEUR 2

Étapes de construction du nuancier : 

• Poser la couleur 1  pure—-> la dégrader vers la droite 
• Poser la couleur 2 pure —-> la dégrader vers la droite 
• Prendre de la couleur 1 dans un godet : ajouter un peu de couleur 2. Poser sur le nuancier et dégrader vers la droite 
• Dans le mélange précédent, rajouter encore un peu de couleur 2. Poser sur le nuancier et dégrader vers la droite 
• Dans un godet faire un mélange 50/50 des deux couleurs : Poser sur le nuancier et dégrader vers la droite 
• Dans la couleur 2 pure : ajouter un peu de couleur 1. Poser sur le nuancier et dégrader vers la droite 
• Dans le mélange précédent, rajouter encore un peu de couleur 1. Poser sur le nuancier et dégrader vers la droite 

Vous avez peut-être dans votre palette des verts, des rouges, des bleus différents : profitez-en pour les tester de cette façon. 

Si vous faites un nuancier avec de la gouache vous pouvez procéder comme ci-dessus en diluant vos couleurs à l’eau, pour une gouache utilisée en transparence. Si vous utilisez la gouache dans son opacité, éclaircissez progressivement avec du blanc. Vous obtiendrez une belle palette de tons pastels. 

Notez bien sur votre nuancier le nom des couleurs pures que vous avez utilisées, ainsi que le médium (gouache, aquarelle…). En effet, si vous utilisez de la gouache et de l’aquarelle, ou que vous avez plusieurs marques d’aquarelle, il faut que vous puissiez retrouver facilement les couleurs que vous avez utilisées si vous voulez les reproduire un jour. 

Nuancier à partir de 3 couleurs 

C’est un peu plus complexe, il faut être bien attentif ! 

Pour cela je suis partie de la même grille que ci-dessus et j’ai rajouté à droite la couleur 3. 

Le process est ensuite le même, on procède lentement et dans l’ordre. 

Nuancier : la méthode rapide

Parfois je vais plus vite : en partant de 3 à 5 couleurs, je fais des mélanges aléatoires. 

Quelques réflexions utiles sur les couleurs

Veiller à préserver la vibrance de la couleur

La couleur est au top de sa luminosité et de sa vibrance lorsqu’elle est pure. 

Au-delà de 3 couleurs dans le mélange vous tuez la luminosité. En cours de travail, si vous ajoutez un peu de ceci, un peu de cela pour obtenir la couleur parfaite, il y a peu de chance que ça marche. Vous avez vu qu’avec 3 couleurs, on peut déjà créer des déclinaisons à l’infini. C’est pour cela qu’un nuancier est fort utile ! 

Toutes les couleurs/pigments n’ont pas le même comportement

Il y a des couleurs qui ne se laissent pas faire si facilement : elle sont difficiles à mélanger, et prennent tout de suite le pas sur l’autre couleur. J’ai eu le cas avec le Vert Sapin, très difficile à mélanger.

Pas de noir dans le nuancier

On s’efforce de ne pas assombrir une couleur avec du noir : on utilise plutôt un brun type sépia ou terre d’ombre, un bleu outremer, du gris de Payne. Le résultat sera plus lumineux, plus délicat, moins triste.

Ceci étant dit, j’ai découvert il y a peu le nuancier utilisé par le peintre suédois Anders Zorn, dans lequel justement, il utilise le noir pour comme valeur foncée. Et le résultat est aussi très intéressant !

Conclusion 

Plus d’hésitation, consacrez un carnet à la création de nuanciers ! Vous réaliserez la richesse qui se cache dans les 12, 18 ou 20 couleurs de votre palette. Vous réaliserez que vous pouvez quasiment créer toutes les nuances, et qu’il n’y a pas besoin de racheter en permanence de nouvelles couleurs. Inutile d’investir dans les 98 couleurs de Sennelier, ou les 246 nuances de Daniel Smith. Certains peintres travaillent uniquement avec 5 couleurs, du blanc et du noir !

J’en profite pour glisser un petit mot sur le choix des couleurs à l’achat : 

• Essayez d’opter pour de la qualité fine ou extra-fine, en particulier pour les gouaches. 
• Choisissez si possible des marques de références comme Lefranc Bourgeois, Sennelier, Schminke, Winsor & Newton. Ce sont de vrais fabricants de mediums qui travaillent avec des pigments de haute qualité, des techniques de broyage éprouvées et des liants de qualité aussi. On voit fleurir en ce moment des offres pour des aquarelles artisanales, “faites maison”, avec des noms de couleur aussi alléchants que Marshmallow, Mirabelle ou Kiwi. C’est tentant, mais est-ce que achèteriez les coloris Jambon, Moutarde et Cornichon ? Probablement pas, pourtant c’est aussi du rose, du jaune et du vert… Donc je suis un peu sceptique sur l’aspect marketing versus qualité réelle et conservation dans le temps.

Enfin, faites vos propres expériences pour vous familiariser avec vos pigments. Ce n’est pas gâcher du papier, c’est de l’auto-apprentissage et un investissement très rentable. 

A vous de jouer ! 

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