Début mars, je vous avais parlé de mon immersion dans le XVIIIème siècle, dans un article consacré la Ronde. C’est après avoir suivi un cours en ligne sur les motifs de Toile de Jouy que j’ai voulu approfondir mes connaissances sur les motifs typiques des toiles de coton très en vogue au XVIIIème siècle, que l’on appelait les « indiennes ». Ces tissus imprimés ont révolutionné non seulement la mode, mais aussi toute l’industrie textile en Europe. Longtemps interdits en France, à cause de la concurrence faite aux fabricants de laine et de soie, leur fabrication fut finalement autorisée et de nombreuses fabriques d’indiennes virent le jour, notamment à Mulhouse, Marseille et à Jouy-en-Josas avec la célèbre fabrique Oberkampf.
Le musée de la toile de Jouy retrace l’histoire des « indiennages », l’évolution de motifs – initialement copiés des motifs indiens – et des procédés de fabrication. Lors de la visite, j’ai été absolument séduite par l’inventivité et la créativité de ces motifs fleuris. J’ai donc pas mal dessiné et exploré ce style, et je me suis dit que cela vous intéresserait peut-être, vous aussi, de vous lancer dans ces dessins de fleurs stylisées aux possibilités multiples.
L’origine des motifs fleuris appelés « indiennes »
Comme leur nom l’indique, les motifs d’indienne proviennent… d’Inde. En effet, les Indiens maîtrisaient depuis des siècles des techniques d’impression de tissus avec des blocs de bois gravés à la main. Des couleurs supplémentaires pouvaient être ensuite rajoutées directement au pinceau sur l’étoffe.


Les motifs étaient essentiellement végétaux : fleurs, arbres, branchages, rameaux. Les premières toiles de coton produites en Europe étaient directement inspirées des motifs créés par les indiens. Puis, les fabricants d’indienne louèrent les services de dessinateurs qui développèrent leurs propres motifs inspirés de la flore locale, et des naturalistes anglais. La fabrique de Jouy en Josas développa ainsi près de 30000 motifs différents.

Aujourd’hui, certains de ces motifs sont toujours utilisés et remis au goût du jour pour les collections textiles (mode, ameublement), notamment par des fabricants de tissus comme la maison Frey.
Si toute la partie historique vous intéresse, je vous donne quelques liens en fin d’article pour approfondir. Passons maintenant au dessin !
La structure de base des fleurs
Les motifs d’indienne mettent en scène une infinie variété de dessins de fleurs. On trouve aussi bien des motifs simples, que des extrapolation plus complexes : la seule limite est l’imagination.
Pour la structure de base, on choisira un point de départ : un rond pour commencer, qui figurera le coeur de la fleur. Pour dessiner les pétales, on peut esquisser des lignes directrices, afin de bien les répartir. Rien qu’avec ce modèle de base, on peut essayer différentes formes de pétales : ovales simples, en S, crantés, rond, etc.


Pour le départ de la fleur, on peut également varier, et construire à partir d’un coeur différent :

Rien qu’avec ces 3 planches, vous pouvez déjà créer une grande variété de fleurs !
Les tiges et branchages
Les motifs d’indiennes sont construits sur des branchages qui s’entrecroisent. Là encore, il existe de nombreuses variations : lisses, côtelés, avec des effets de veinures, avec des épines, etc.

Les feuilles et rameaux
De même que pour les fleurs, les feuilles se déclinent dans des formes classiques ou totalement stylisées. Ce sont des éléments décoratifs qui vont remplir le motif ou la composition. Les petites feuilles et les rameaux amènent de la légèreté et équilibrent l’ensemble.
Ovales, rondes, en S, frisottées, crantées, remplies de motifs ou de nervures fantaisies : les feuilles sont aussi riches en possibilités que les fleurs. Voici quelques exemples :


Pour compléter un motif ou une composition, on peut encore enrichir avec d’autres petits éléments, comme de petits rameaux, des bourgeons ou des baies.

Créer une composition ou un motif
Pour moi, dessiner des motifs fleuris est une pause plaisir, très relaxante. Je ne sais jamais à l’avance où je vais, je pars de quelques grands traits de contruction – les branchages principaux – que j’agrémente au fur et à mesure.
Je dessine au crayon de papier, puis j’encre le dessin avec un stylo fin UniPin. On peut aussi encrer à la plume et à l’encre de chine, cela donne un trait beaucoup plus vivant et intéressant.

Quelques astuces pour équilibrer un motif ou une composition :
- varier au maximum les éléments
- rythmer, avec des éléments de taille différente
- créer du mouvement, de varier les directions

La mise en couleur
J’aime vraiment beaucoup le dessin tout simple en noir et blanc comme sur la page de garde de mon carnet de motifs (plus haut). Mais parfois l’appel de la couleur est plus fort ! Pour cela j’utilise principalement de la gouache et des Posca pour les petits détails.
Quand on met en couleur, il y a toujours une étape un peu frustrante : en effet, au début, on pose les premiers aplats de couleur et tout parait fade et uniforme. Mais il ne faut pas s’arrêter là, c’est tout le secret : au fur et à mesure, on revient sur chaque forme, on ajoute des détails, on augmente le contraste avec des rehauts de noir ou de blanc.
Quelques astuces pour la mise en couleur :
- Limiter sa palette à 4 ou 5 couleurs pour avoir quelque chose d’harmonieux
- Bien contraster, avec des tons forts, pour donner du caractère à l’ensemble
- Ne pas hésiter à utiliser points, petites hachures pour donner du relief





A vous de jouer
Vous avez tout en main pour créer vos propres compositions fleuries :
- les formes de base de fleurs, feuillages, branches et rameaux
- Les astuces pour équilibrer vos compositions et pour la mise en couleur
Vous pouvez créer juste pour le plaisir – parce que dessiner des fleurs ça détend ! – ou pour créer des cartes, des enveloppes, des petits tableaux, et pourquoi pas des motifs originaux à broder.
Avant de vous laisser, voici quelques ressources qui peuvent vous intéresser et vous inspirer :
- l’application gratuite “La Manufacture Virtuelle d’Oberkampf” : découvrez la vie et l’oeuvre du créateur des célèbres Toiles de Jouy, Christophe-Philippe Oberkampf. De 1760 à 1815, la Manufacture de Jouy-en-Josas a imprimé environ 30 000 motifs différents de toiles qui continuent d’inspirer les créateurs contemporains en France et à l’étranger. Disponible sur : IOS et ANDROID
- Vous pouvez visiter mon tableau pinterest consacré aux toiles indiennes : vous y trouverez de nombreuses inspirations.
- Ici, un article intéressant sur l’histoire de la fabrication des toiles de coton imprimées au XVIII.
A très bientôt,
Véro
Merci beaucoup Véronique pour cette balade dans le temps et ces idées créatives. Y’a plus cas !
Avec plaisir !
quelle belle recherche !!! ça demande beaucoup de travail un article pareil et il est très inspirant, merci tout plein pour ce partage